Aux origines des juifs ashkénazes

 

Qui étaient les ancêtres des gens se disant aujourd’hui « juifs ashkénazes » – juifs dont les ascendants récents vivent ou vivaient en Europe centrale et de l’Est ? Cette question est depuis longtemps vivement débattue, et plusieurs réponses ont été proposées. Une étude génétique réalisée par une équipe internationale dirigée par Martin Richards, des Universités de Leeds et de Huddersfield, en Grande-Bretagne, apporte des précisions intéressantes… et surprenantes.

Selon l’hypothèse la plus répandue, les ancêtres des juifs ashkénazes sont arrivés en Europe en provenance de la Palestine et de son voisinage vers le Ier siècle de notre ère, après la destruction de Jérusalem et de son Second temple par l’armée romaine de Titus (en 70). Des unions mixtes avec des habitants européens de souche auraient alors conduit à un certain brassage génétique.

D’après une autre thèse, les juifs ashkénazes auraient une origine principalement européenne et proviendraient de populations indigènes d’Europe, d’Italie surtout, qui se seraient converties au judaïsme. Certains spécialistes ont même avancé que les juifs ashkénazes proviennent majoritairement de conversions massives qui ont eu lieu dans l’empire des Khazars, un peuple semi-nomade du Nord du Caucase, à la suite de l’adoption de cette religion par sa classe dirigeante, entre le IXe et le Xe siècle de notre ère.

En résumé, les principales origines possibles des juifs ashkénazes sont au nombre de trois : le Levant, l’Europe et le Nord du Caucase. Et les trois ont pu jouer, en différentes proportions. Les récentes études scientifiques sur la question, dont la plupart consistaient à analyser la fréquence de certains gènes, ont abouti à des conclusions contradictoires. L’équipe de M. Richards a opté pour une démarche fondée sur la reconstruction de la généalogie à partir de l’analyse de l’ADN mitochondrial.

L’ADN mitochondrial, contenu dans les organites cellulaires nommés mitochondries, est transmis uniquement par les mères (seul l’ovule transmet ses mitochondries à l’œuf et à la descendance ; le spermatozoïde ne transmet que son noyau). Il reflète donc la lignée maternelle. Un autre marqueur génétique intéressant à utiliser est le chromosome Y : il n’est présent que chez les hommes et reflète donc la lignée paternelle. Un avantage important de l’utilisation de l’ADN mitochondrial et du chromosome Y dans les études génétiques est que ces deux matériaux ne sont pas soumis au phénomène de recombinaison homologue (un brassage génétique) entre chromosomes maternels et paternels.

M. Richards et ses collègues ont utilisé un ensemble de données sur l’ADN mitochondrial bien plus nombreuses que dans des travaux précédents d’autres équipes. Ils ont trouvé que plus de 80 pour cent des ADN mitochondriaux modernes des juifs ashkénazes ont une origine européenne, qu’une petite proportion de ces ADN proviennent du Proche-Orient, et que pratiquement aucun ne semble provenir du Caucase Nord. En d’autres termes, la lignée maternelle des juifs ashkénazes remonte principalement à l’Europe occidentale préhistorique !

Quant à la lignée paternelle, des études précédentes portant sur le chromosome Y avaient montré une origine très majoritairement proche-orientale, avec cependant une forte proportion européenne chez les ashkénazes Lévites, pour lesquels une ascendance Khazar serait donc possible.

Des hommes originaires surtout du Proche-Orient, des femmes d’origine surtout européenne : le tableau génétique des juifs ashkénazes souligne le rôle important qu’a dû jouer la conversion des femmes dans la formation de cette population.

Source: Pourlascience.fr

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