Le Judaïsme comme race et comme religion
Le 27 Janvier 1883, l’écrivain, philosophe et historien français, Ernest Renan intervient lors d’une conférence organisée par le Cercle Saint-Simon. Elle a pour thème le judaïsme.
Au cours de celle-ci, Ernest Renan montrera comment le judaïsme, à l’origine religion nationale et locale, est devenu au fil du temps une religion universelle.
En outre, il remet sérieusement en question le concept de « race juive » sans toutefois nier sa réalité.
La compréhension de son analyse doit tenir compte du contexte d’une époque où la notion de race était encore concevable. Ces écrits pourraient également être remis en perspective aujourd’hui avec l’existence de l’état d’Israël.
Voici quelques extraits intéressants ainsi que la reproduction complète de la conférence.
Extraits:
« La religion d’Israël, elle aussi, a sans doute été bien longtemps une religion égoïste, intéressée, la religion d’un dieu particulier, Iahve. »
« Que la religion israélite, que le judaïsme ait été à l’origine une religion nationale, cela est absolument hors de doute. C’est la religion des Beni-Israël, laquelle, pendant des siècles, n’a pas été essentiellement différente de celle des peuples voisins, des Moabites, par exemple. Iahve, le dieu israélite, protège Israël, comme Chamos, le dieu moabite, protège Moab. »
« La religion devient de la sorte quelque chose de moral, d’universel ; elle se pénètre de l’idée de justice, et c’est pour cela que ces prophètes d’Israël sont les tribuns les plus exaltés qu’il y ait jamais eu, tribuns d’autant plus âpres qu’ils n’ont pas la conception d’une vie future pour se consoler, et que c’est ici-bas, d’après eux, que la justice doit régner. »
« Le premier fondateur du christianisme, c’est Isaïe, vers l’an 725 avant Jésus-Christ. En introduisant dans le monde israélite l’idée d’une religion morale, l’idée de la justice et de la valeur secondaire des sacrifices, Isaïe a précédé Jésus de sept siècles. »
« La lumière émanera donc du peuple juif, et cette lumière remplira le monde entier. Une telle idée n’a rien d’ethnographique ; elle est universelle au plus haut degré, et le peuple qui la proclame est évidemment appelé à une destinée qui dépassera de beaucoup les bornes d’un rôle national déterminé. »
« Il est probable que, dans les bandes de juifs qui revenaient de l’Orient, il y avait plus d’hommes que de femmes ; ce qui obligea les émigrants à prendre des femmes dans les tribus voisines. Ces unions sont prohibées au point de vue religieux ; mais c’est précisément parce qu’elles sont sévèrement interdites qu’il est probable qu’elles avaient lieu sur une très grande échelle. »
« Arrivons à l’époque grecque et romaine. C’est le moment où le prosélytisme juif arrive à la plus complète expansion ; c’est le moment aussi où l’ethnographie du peuple juif, jusque-là renfermée dans des limites assez resserrées, s’élargit tout à fait et admet une foule d’éléments étrangers. Je parle à des personnes trop instruites pour qu’il me soit nécessaire d’insister sur les détails. Tout le monde sait combien fut active cette propagande juive, durant l’époque grecque, à Antioche et à Alexandrie. »
« Dion Cassius sait qu’il y a des juifs de race, continuateurs de l’ancienne tradition, mais qu’à côté d’eux, il y a des juifs qui ne sont pas juifs de sang, qui néanmoins sont absolument semblables aux juifs pour les observances religieuses. »
« Il en est presque toujours ainsi dans l’histoire : quand un grand et large courant d’idées se produit dans le monde, ceux qui ont été les premiers à le provoquer en sont les premières victimes ; alors ils se repentent presque de ce qu’ils ont fait, et, d’excessivement libéraux qu’ils étaient, ils deviennent étonnamment réactionnaires. Le Talmud, c’est la réaction. Le judaïsme sent qu’il a été trop loin, qu’il va se fondre, se dissoudre dans le christianisme. Alors il se resserre. A partir de ce moment-là, le prosélytisme disparaît ; les prosélytes sont traités de fléau, de « lèpre d’Israël ». Mais, avant cela, je le répète, les portes avaient été largement ouvertes. »
« Il n’a tenu qu’à un fil que l’Arabie ne soit devenue juive. Mahomet a été juif à une certaine époque de sa vie, et on peut dire, jusqu’à un certain point, qu’il l’est resté toujours. Les Falaschas, ou juifs d’Abyssinie, sont des Africains, parlant une langue africaine et lisant la Bible traduite en cet idiome africain. »
« Cette conversion du royaume des Khazars a une importance considérable dans la question de l’origine des juifs qui habitent les pays danubiens et le midi de la Russie. Ces régions renferment de grandes masses de populations juives qui n’ont probablement rien ou presque rien d’ethnographiquement juif. »
« Il est hors de doute aussi qu’il y a eu dans le phénomène de la formation de la race israélite actuelle un apport de sang palestinien primitif ; mais, en même temps, j’ai la conviction qu’il y a dans l’ensemble de la population juive, telle qu’elle existe de nos jours, un apport considérable de sang non sémitique; si bien que cette race, que l’on considère comme l’idéal de l’ethnos pur, se conservant à travers les siècles par l’interdiction des mariages mixtes, a été fortement pénétrée d’infusions étrangères, un peu comme cela a eu lieu pour toutes les autres races. »
« La position des protestants, dans un pays où, comme en France, le protestantisme est en minorité, a beaucoup d’analogie avec celle des juifs, parce que les protestants, pendant fort longtemps, ont été obligés de vivre entre eux et qu’une foule de choses leur ont été interdites, comme aux juifs. Il se crée ainsi des similitudes qui ne viennent pas de la race, mais qui sont le résultat de certaines analogies de situation. »
« Quand l’Assemblée nationale, en 1791, décréta l’émancipation des juifs, elle s’occupa extrêmement peu de la race. Elle estima que les hommes devaient être jugés non par le sang qui coule dans leurs veines, mais par leur valeur morale et intellectuelle. C’est la gloire de la France de prendre ces questions par le côté humain. »
Texte intégral:
Le_Judaisme_comme_race_et_comme_religion (1)
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