Escroc ou facho? Un mal français
Ce titre fait référence à l’entre-deux-tours de l’élection présidentielle de 2002. A la surprise générale, Jean-Marie Le Pen parvenait au second tour au détriment du candidat socialiste Lionel Jospin qui pour l’occasion décida de se retirer de la vie politique.
Pour faire barrage au Front National, l’ensemble des partis républicains de gauche et de droite prirent la décision de faire alliance dans les urnes et dans la rue. Une union républicaine qui se voulait sacrée mais dont on est obligé de reconnaitre qu’elle était surtout contre-nature. En effet ses acteurs défendaient des idées politiques différentes voire opposées.
Pendant les manifestations, les citoyens adoptèrent ce slogan aussi détonnant que consternant : « Votez escroc, pas facho ». Cela signifiait évidemment Chirac plutôt que Le Pen.
Ce titre fait également écho à la conjoncture politique pré-électorale actuelle qui voit d’un côté la montée des extrêmes et de l’autre les scandales financiers. Il est intéressant de mettre en relief la dualité FN/Affaire Fillon. Le score supposé du FN au premier tour symbolise la radicalisation de la société française tandis que les déboires de François Fillon sont, au-delà du simple intéressé, symptomatiques de la corruption de l’establishment.
C’est l’opposition de deux dérives de notre démocratie, presque celle de deux immoralités.
Certains diront que le drame avec le Front National, c’est son idéologie alors que les partis démocratiques classiques véhiculent une vision plus raisonnable et plus respectable de la société mais souillée par des représentants carriéristes et peu scrupuleux. D’un côté, c’est l’idéologie qui est dangereuse, de l’autre ce sont les hommes qui ne sont pas à la hauteur des valeurs républicaines. Cette conception incite à penser que si le marquage idéologique du FN le rend irrécupérable, la république pourrait en revanche être sauvée si elle était mieux représentée. Cela expliquerait le choix des français en faveur de Chirac et au détriment de Le Pen en 2002.
Et si c’était cette république dont on fait l’éloge qui portait en germe sa propre destruction. Les scandales financiers qui se succèdent et se répètent ne seraient que les symptômes le plus graves d’un système politique aux abois. Combien de prétendants à des hautes fonctions qui avaient au départ une vrai vocation sont tombés dans le piège du carriérisme ? Le contraste entre les promesses tenues et les réalisations concrètes est saisissant, toujours décevant et pourtant désespérément récurrent.
Mais n’oublions pas que nous participons, même passivement, à entretenir ce marasme. Avec nos faux espoirs déçus et notre refus de voir la réalité en face. Incapables comme nos pseudo-dirigeants d’imaginer un nouveau système de société, de sortir de notre confort et de regarder au-delà des sentiers battus. A nous complaire dans le mépris du système et la peur des extrêmes. A taper sur le bouc-émissaire en agitant l’épouvantail.
Peut-être que le salut viendra de l’extérieur…pour le meilleur ou pour le pire.
Les français sont peut-être trop faibles et trop désespérés pour parvenir eux-mêmes à leur propre épanouissement. A moins qu’ils soient trop médiocres pour mériter de rester maitres de leur destin.
« Ni escroc, ni facho », impossible n’est pas français ?