Fiction : Cataclysme sportif

Il se repassait ce satané match de foot. Celui durant lequel son équipe favorite avait perdu en finale de la coupe des unions fédérées et antinomiques. Cet été, il s’est repassé le match une dizaine de fois l’après-midi. C’est vrai que c’étaient les vacances scolaires et il avait du temps pour ressasser cette défaite. Pourtant, à chaque fois qu’il se repassait le match, il espérait que le score change, que son équipe parvienne enfin à marquer le but libérateur après avoir dominé toute la rencontre. Au lieu de ça, le même scénario devant ses yeux, chaque après-midi : la défaite aux tirs au but, toujours le même faux espoir, et la déception constamment ressassée comme un plaisir malsain teinté d’espoir surnaturel.

Pourtant, en ce vendredi après-midi, une folie se produisit en ce mois d’août encore ensoleillé à 18h dans un contexte de fin de vacances et de détente inférieure à la pulsion des vacances passées dans le Sud. Il vit à la télé son équipe marquer 1 minute avant la fin de la prolongation. Elle était sacrée championne de la coupe des unions fédérées et antinomiques. D’abord, il exultait dans une logique de déception enfin vaincue. Un soulagement intempestif illuminait son corps, grandi et devenu beau, puissant et gracieux. Comment ce miracle a-t-il pu se produire alors qu’au loin des chiens aboyaient dans une insignifiance personnelle qui donnait toutefois de l’écho à ce miracle mérité mais qui a mis une claque gênante au réel. Comment allait-il vivre cela après l’exultation ? S’angoisser par ce surnaturel qui brise des lames, envahit des terrains de perdants pour leur donner une couronne violente dans un nuage brumeux et intrusif.

Non, il se mit à croire au miracle ; Il y voyait une force surnaturelle qui viendrait tacler les injustices et les expulser du banc d’une société qui commençait à décliner et agacer les êtres supérieurs de ce monde ou d’un autre monde. Il décida alors de se repasser en VHS tous les événements dramatiques du monde en pensant que sa volonté permettrait de modifier ces événements afin qu’ils aient une issue positive. Hélas, ça ne marchait pas. Pire, des événements plus graves que ceux s’étant déroulés dans le passé se produisirent. Au fur et à mesure qu’il se repassait les films d’événements dramatiques prélude à une destruction souhaitée des êtres malfaisants, des événements de plus en plus grave et de plus en plus immoraux se produisirent. Leur cruauté est indescriptible par des faits odieux et des tortures mentales qui feraient vaciller les lions les plus dévorateurs.

Il se mit alors à se détester, puis à se haïr, puis à haïr cette fameuse défaite qui s’est transformée, il ne sait par quel faux-Dieu, en fait Diable, en victoire. Il se dit que convoquer la magie pour modifier des événements insignifiants au regard de l’intérêt et de la morale mondiale, pouvait aggraver un monde déjà meurtri par les horreurs du passé qui transcendent encore le présent et qui se garde une place au chaud dans cet avenir démoniaque bien qu’humain. Pouvait-il revenir en arrière ? Pour le savoir, il devrait regarder de nouveau le match en espérant cette fois la défaite de son équipe dont les joueurs étaient originaires des 4 coins d’une seule maison partagée en appartements froids mais réchauffée par le travail et la performance. C’est ce qu’il fit et s’opéra un retour à la case départ : son équipe perdit aux tirs au but. La défaite de nouveau convoquée mais non moins provoquée par la même magie qui avait pour but de se mettre au service cette fois du réel.

Il constata que les événements aussi dramatiques soient-ils étaient revenus à la normale en ce lundi, suite à un week-end de terreur et presque inconscient par les ardeurs et la tourmente. Il put enfin trouver l’apaisement. Il comprit : la souffrance infligée ou subie peut avoir de conséquences plus dramatiques si on essaie de l’éliminer car l’ordre des choses est clair et que le fil de l’histoire est tissé. Il prit une plume pour écrire bien que de nouveaux moyens technologiques étaient à sa disposition. Ses écrits et lectures furent intenses et son contact avec le monde extérieur filtré par son intelligence et son dévouement au travail mondial.