Fraternisation judéo-polonaise face à la Russie
Les manifestations patriotiques de 1861 et l’insurrection de 1863 visaient à l’indépendance d’une Pologne encore sous le joug de la Russie. Elles virent l’émergence d’un courant patriotique, religieux et démocrate.
Dans l’inconscient collectif, le sort des polonais était très lié à celui des juifs : perte de la patrie, occupation, persécutions, héroïsme, martyre, exil et nostalgie de la liberté.
» Oh pleure, pleure Pologne ! » sœur de Jérusalem écrivit un poète de l’époque.
Le rabbin Dow Ber Meisels appela les » frères d’Israël » à marcher main dans la main avec le peuple polonais après l’enterrement des » cinq morts « , victimes de la manifestation à Varsovie en février 1861.
Le poème » les deux Israël » louait les exploits de Michal Landy, un jeune juif tué pendant la manifestation d’avril 1861 après avoir saisi le crucifix d’un moine tombé sous les balles des gendarmes.
» Ô toi, élu du peuple élu
Pour unir les deux peuples à jamais
Pour sceller de ton sang l’alliance des deux nations «
S’ensuivit alors une explosion euphorique de fraternisation judéo-polonaise.
Des manifestations patriotiques se déroulaient dans les églises et les synagogues. Les juifs affirmaient leur fierté d’être polonais sans renier leurs origines.
De nombreux juifs ont activement participé à l’insurrection de Janvier. Ils étaient présents à tous les niveaux et à tous les postes. Selon le poète polonais, Cyprian Norwid, leur dévouement a été plus grand que celui de la noblesse polonaise.
Le gouvernement d’insurrection nationale déclarait dans un manifeste en hébreu et en polonais aux » frères polonais dans la loi de Moïse » : » quand avec l’aide de Dieu, nous libérerons le pays de l’occupation moscovite, vous et vos enfants allez profiter de tous les droits civiques, sans exceptions ni restrictions car le gouvernement ne vous demandera pas votre foi ni votre origine ».
Malheureusement , après la chute de l’insurrection de 1863, la rivalité économique capitaliste s’étant accrue, des courants politiques prêchant l’idéal d’une Pologne pure du point de vue ethnique et religieux se renforçaient, accompagnés d’explosions antisémites.
La dernière résonance de la fraternité polono-juive à l’époque de l’insurrection de Janvier se retrouve dans la trilogie écrite en Yiddish par Joze Opatoszu; « Dans les forêts polonaises », publiées dans les années 1915-1918. Ce roman raconte de façon émouvante l’échec d’une unité d’insurgés et le drame de ses soldats juifs.
Source: https://books.google.fr/books…