Justice et autonomie juive: l’exemple aragonais

Au 13ème siècle, les Juifs qui vivaient dans l’espace Aragonais, étaient soumis, comme les autres sujets du Royaume, à l’autorité du Roi.

Pourtant en matière de justice, les autorités royales collaboraient avec les autorités juives. Il s’agissait d’appliquer aux Juifs à la fois la loi du Royaume et la loi juive, la Halakha…

En matière de droit commun, c’était les lois du royaume qui s’appliquaient aux Juifs. Mais dans les affaires internes à la communauté juive, voire dans celles entre Juifs et chrétiens, c’était la Halakha qui primait.

Avec parfois des contradictions malgré une collaboration pacifique et efficace. C’était les cas lorsque par exemple des conflits opposaient des Juifs à des chrétiens. Il était difficile pour ces derniers d’accepter d’être régis par la loi juive.

Cette autonomie judiciaire accordée aux Juifs montrait la reconnaissance par le Roi d’une certaine autorité de la Halakha. Mais c’était surtout un moyen pour le Roi de percevoir en contrepartie de l’argent des institutions juives qui demeurait sous son contrôle malgré l’autonomie accordée.

Ce bon fonctionnement qui satisfaisait aussi bien le roi que les Juifs a parfois été remis en cause, notamment par les autorités ecclésiastiques. Elles ont voulu soumettre les Juifs aux règles de l’Inquisition. Durant cette période, le judaïsme était considéré comme une religion hérétique, pas pour ses fondements doctrinaux, mais en raison de certaines pratiques. De plus les tenants de l’Inquisition considéraient que les Juifs étaient également responsables si des chrétiens se convertissaient au judaïsme. Pourtant, le Roi pris à plusieurs reprises fait et cause pour les Juifs. Ils n’entendaient pas se faire subtiliser son pouvoir sur les Juifs par l’église. Les Juifs ont donc profité de la domination du Roi sur les ecclésiastiques ( dont il se méfait peut-être davantage que les Juifs).

Pour conclure, on peut dire que l’autonomie accordée aux Juifs n’était pas gratuite. Au sens propre (les impôts versés par les institutions juives) comme au figuré (le contrôle exercé sur les Juifs). Mais elle a montré un certain respect de la loi juive au point que celle-ci faisait aussi parfois autorité sur les chrétiens. Cet exemple montre une certaine ingéniosité politique car il était très difficile de faire cohabiter deux systèmes législatifs très différents, voire opposés s’agissant de certains principes.

 

Source :https://www.cairn.info/revue-le-moyen-age-2012-2-page-411.htm