Meyer Lansky, les causes de son ulcère … La souffrance du gangster…
Lansky avait toujours l’air en forme, mais Teddy se rendit compte que les apparences étaient trompeuses. Peu après leur mariage, il se plaignit d’une violente douleur dans le bras gauche. Un médecin diagnostiqua un hygroma et, en examinant Meyer, il découvrit également une bosse dure dans le dos, une tumeur. Peu après avoir été opéré, il ressentit de violents maux d’estomac. Il souffrait d’un ulcère du duodénum.
Meyer voulait le meilleur traitement. Il alla consulter un gastro-entérologue, le Docteur Seymour J. Gray, un professeur de Harvard qui exerçait au Peter Bent Brigham Hospital de Boston.
Quand Meyer Lansky pénétra dans son cabinet, le docteur Gray ne possédait que des renseignements médicaux sur son nouveau patient. » Je ne savais rien de lui, ma secrétaire avait juste noté son nom », se souvient le Docteur Gray.
Pour briser la glace, le médecin s’enquit de la profession de son client. » Il m’a dit : » Vous pouvez considérer que je m’occupe de jeux. » Puis il a ajouté : » Doc – je ne l’oublierai jamais -, ne jouez jamais. On perd. » «
Après avoir confirmé le diagnostic, le médecin donna quelques conseils à Meyer. Lansky devait manger une nourriture moins épicée et cesser les en-cas à toute heure. Il avait surtout besoin de détente. Le Docteur Seymour Gray avait mené une étude sur le stress et ses conséquences. » Je lui en ait parlé, et lui ait expliqué comment le combattre. «
Lansky fut impressionné par cette visite au Docteur Gray. Il retourna fréquemment le consulter pour des ennuis allant de la hernie aux problèmes cardiaques, en passant par la bronchite. Gray le renvoyait sur d’autres spécialistes, tout en continuant à traiter son ulcère. Mais manifestement, son patient ne possédait pas les ressources nécessaires à la guérison.
» Les gens qui ont des ulcères ne s’expriment pas. C’est pour cela qu’il faut leur dire se se laisser aller, de crier quand ils en ont envie. Lui, gardait tout en lui « , explique le docteur.
La plupart de gens portent des sous-vêtements propres lorsqu’ils vont voir un médecin ; ceux de Lansky étaient exceptionnellement propres. » J’ai vu beaucoup d’hommes déshabillés, mais je n’ai jamais vu quelqu’un d’aussi scrupuleusement propre que Meyer Lansky. «
Pour le Docteur Gray, le fond des problèmes de Lansky résidait dans une personnalité hypercontrôlée. » Il n’arrivait pas à exprimer ses sentiments. En outre, il y avait sa petite taille, le fait d’être un immigré, l’impression de venir d’une classe inférieure… C’est un homme remarquablement intelligent…
Il savait que d’être un Juif du Lower East Side ne vous place pas particulièrement haut dans l’échelle sociale. Il n’était pas un grand bourgeois de Boston, et ça le marquait profondément. «
Meyer lui racontait l’histoire de ses bagarres avec des bandes du Lower East Side. » Quand j’étais jeune, je me battais sans arrêt. J’étais un sacré bagarreur. Comme j’était petit, les autres me tombaient dessus, mais je me débrouillais bien avec mes poings. » Meyer relatait tout cela avec fierté. Le message était clair : il avait dû jouer des coudes pour s’en sortir, et cette époque était révolue. À entendre les souvenirs du patient, le médecin comprit qu’une partie de Meyer était encore entrain de se battre dans le Lower East Side.
» Il avait un indéniable complexe d’infériorité « , ajoute le Docteur Gray.
À la fin des années 40, Meyer Lansky était un » prince gangster « . Il était le meilleur dans son secteur, avec ses affaires de jeux en Floride, à Las Vegas, à la Nouvelle Orléans et à Saratoga Springs; À la différence des Rothstein, Luciano et Benny Siegel, Meyer avait survécu parce qu’il n’avait pas d’appétits démesurés. Meyer Lansky gardait sa maîtrise de soi.
Mais il y avait une contrepartie, il s’était enfermé en lui-même. Meyer Lansky avait abandonné l’atelier de carrosserie pour une alternative simple, rentable et bien plus amusante. Mais ses visites au gastro-entérologue lui rappelait que, même lorsqu’on est un gangster, il y a un prix à payer pour tout.
Source : Meyer Lansky, le cerveau de la Mafia
Robert Lacey